vendredi 4 février 2011

Zerah.. (33)

  Zerah restaure les vieilles maisons, il a une équipe de cinq hommes, tous bédouins. Zer est né au Yémen et parle couramment l’arabe; il est l’aîné de cinq garçons. Sa famille habite le village. Le père, bel homme fier et taciturne, tient une épicerie sur la petite place, en face de l’arrêt du bus . Le soir venu, dans son jardin en front de rue, il s’installe sur un banc et mâche son khât, les yeux dans le vague, rêvant sans doute de là-bas, de ce pays qu’il a dû quitter à contrecoeur. La mère est une petite femme menue mais solide, constamment agitée et pestant à longueur de journée contre le monde entier. Le benjamin des frères, Yoram, est encore un gamin, puis il y a Shimon, il a dix huit ans et veut devenir marin comme son frère Ezrah et enfin, Yaacov, le chauffeur d’autobus qui va bientôt se marier avec Daisy, une américaine du Minnesota. Les cinq frères sont beaux, mais le peu que je sais d’eux me donne à penser qu’ils ont tous un grain, mais le plus fou est sans doute Zerah! 
  De jour en jour, je découvre son caractère psychotique. Jusqu’à présent rien de bien grave, sinon de petits mensonges dont je ne suis pas dupe. Tout au début, je lui avais fait comprendre qu’il ne fallait pas me raconter de bobards, mais il s’est fâché, me disant que je ne devais jamais, au grand jamais, mettre en doute aucune de ses paroles, j’étais un peu effrayée! J’ai donc appris à la boucler quoi qu’il dise...
  Depuis que je me suis mise en ménage, je ne dessine plus, je n’en éprouve pas le besoin, je n’ai même plus rendu visite à Gilberte, ni donné signe de vie à ma famille. Désormais, mon univers c’est Zerah. Je sens bien qu’une part de lui m’échappe. Evidemment, la langue est une barrière, mais j’apprends vite, encore quelques mois et je parviendrai à traduire mes pensées en hébreu...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire