lundi 4 avril 2011

Je suis très troublée.. (87)

  Je suis très troublée par mon rêve. D’aucuns diront que je veux la tête de Zer. En réalité, je ne nourris ni rancoeur, ni haine envers lui, j’en suis même étonnée; pourtant, je ne pense pas l’aimer, c’est d’un tout autre ordre. Il m’attire de manière viscérale, dès que je le vois, je perds tout bon sens - à me demander si j’en ai jamais eu...
  Je suis la prisonnière d’un fou, en cela je suis assez lucide pour me rendre compte qu’il l’est vraiment, ce qui d’ailleurs ne change rien à l’affaire. Il faut que je sorte de cette geôle; j’ai encore inspecté de fond en comble la maison, il n’y a aucune issue. Fracturer la serrure serait un moyen d’échapper, encore faut-il avoir les outils qui restent introuvables. Zer est tellement imprévisible, je n’essaye pas d’imaginer ses intentions, c’est peine perdue. 
   Les heures tournent, il est déjà midi, j’ai un petit creux, je vais dans la cuisine et ouvre le frigo; à part la bouffe du chat, il n’y a rien. J’ouvre une armoire, je suis sauvée, il y a des  tas de conserves. J’ouvre une boîte de sardines et mange avec mes doigts. Je suis rassurée, au moins, je pourrais tenir plusieurs jours s’il le faut. Je commence à trouver le temps long. Il y a beaucoup de livres dans la maison, mais pour la plupart en hébreu et anglais. J’ai jamais aimé lire en anglais; pour l'hébreu, c’est une autre histoire; autant j’ai appris très vite à parler avec une certaine aisance, autant la lecture et l’écriture me posent problème. J’ai un blocage, j’arrive à déchiffrer les lettres, mais ne fais pas d’effort, sachant que je ne pourrai jamais vraiment maîtriser cette langue. 
  Je m’ennuie, j’en ai marre d’être enfermée. Soudain, j’ai une idée: et si je me mettais à crier très fort, peut-être que quelqu’un m’entendrait; le problème, c’est qu’il n’y pas de voisin direct. La maison est isolée, la route passe à quelque centaine de mètres plus bas. J’ouvre une des fenêtres, j’inspire profondément et me mets à hurler à l’aide, je répète plusieurs fois mon appel, j’attends. Après dix minutes, rien, seulement le silence qui perdure. La nuit tombe, je n’ai pas sommeil, je suis angoissée. Je me souviens avoir vu une armoire à pharmacie que j’avais l’intention d’inspecter avant que Zer n’arrive. Je l'ouvre: quelques flacons, et une boîte de Rohypnol dont il reste quatre comprimés, la notice a disparu. D’après le nom, j’en conclus que ça fera l’affaire. J’avale le tout et retourne vers le canapé du salon.