jeudi 14 février 2013

Pendant quelques minutes... (173)


    Pendant quelques minutes, nous suivons toujours la ligne rouge dans un large couloir qui tourne au fur et à mesure que l’on monte aux étages. Après un moment, nous recevons l’ordre de nous arrêter devant une haute grille donnant sur un espace relativement long dans lequel s’alignent une dizaine de cellules à barreaux. Je me retrouve dans l’une d’elle. Du côté gauche en entrant, iI y a quatre lits superposés; au fond, un minuscule lavabo et une chiotte. On m’octroie la seconde couchette à partir du bas. Il n’y a que peu d’espace entre les lits, juste de quoi s'asseoir et encore, tout est étroit, oppressant à souhait. Heureusement, les cellules restent ouvertes pendant la journée, on a le droit de circuler dans la partie commune. Les trois occupantes me fixent sans détour. Je suis désarçonnée, ne sais comment me comporter. Je leur fais un hello timide auquel elles répondent en choeur avec un soupçon de mépris, me semble-t-il.      
  Après un moment de relatif silence, après le départ des gardiennes, un brouhaha sans nom explose par dessus les hauts-parleurs qui déversent à tue-tête de la musique de variété. On se croirait à la foire si on ferme les yeux... Des filles se déplacent sans cesse, d’autres forment de petits groupes ci et là, d’autres encore sont couchées sur leur paillasse ou à même le lino du couloir. Quelques-unes dansent, se marrent, chahutent, gueulent à qui mieux mieux. C’est l’enfer, je ne tiendrai pas le coup longtemps, mais bien-sûr, il n’est pas question de rester ici, tout cela n’est qu’une sordide erreur, il n’y a aucune raison que je sois enfermée dans cette taule de haute sécurité! D’ailleurs, je vais téléphoner à Norton dès que j’en aurai l’occasion. Bon sang! je l’avais complètement oublié celui-là! Normal, je ne sais plus où j’en suis, je n’arrive pas à raisonner, à faire un plan pour me dépêtrer de cet imbroglio. A ma place, qui pourrait, je me le demande. Ce vacarme ne va donc jamais cesser, quelle heure peut-il bien être? Je me souviens d’avoir vu une horloge en arrivant, c’est ça, dans le couloir, j’y jette un coup d’oeil, les aiguilles indiquent six heures. Pendant une fraction de seconde, j’ai une hésitation, six heures du mat ou du soir, ça doit être du matin, la nuit a été longue...