mercredi 5 décembre 2012

Aujourd'hui, j'ai vingt-huit ans... (167)


   Aujourd’hui, j’ai vingt-huit ans. Ce soir, Norton organise une petite fiesta chez lui, en mon honneur. J’ai fait une folie, me suis offert un ensemble, jupe ample et blouse à col bateau en jersey de coton et soie, très léger, rayé de fines lignes de couleurs sable, noir et rouge. Je suis certaine que ça plaira à Norton, il aime les tenues chics et discrètes. Dans une heure, il faut que je sois là, juste le temps de prendre une douche et me refaire une beauté. A huit heures pile, je m’en vais, prends la Chevi direction Westwood. Je roule sans me presser, quand soudain surgit dans mon rétroviseur une bagnole de police. Les phares m’éblouissent, puis la sirène se met à hurler. Un peu saisie, je ne comprends pas tout de suite que je suis en cause. La voiture me fait une queue de poisson, m’obligeant de me garer le long du trottoir. Pétrifiée, je reste assise dans la voiture. Le policier s’avance et me dit:
   -Ton permis, s’il te plaît, ton feu arrière droit est mort, il va falloir le remplacer!
   Et là tout à coup, je me rends compte que je suis foutue. Les choses se bousculent dans ma tête. Je fais semblant de chercher dans mon sac pour gagner du temps. Le type s’impatiente, je lui remets mon permis international tout en sachant qu’il va me demander mon passeport, qui lui, porte la preuve de mon illégalité! Et c’est ce qui se passe. Le flic dit:
   -Mais tu n’es pas en règle! Sors de la voiture en levant les bras et n’essaie pas d'entourloupette!
   Dès que je suis dehors, il me flanque avec brutalité face contre ma bagnole, me donne l’ordre de garder les mains au-dessus de la tête, d’écarter les jambes. Il tâte des deux mains tout mon corps jusqu’à l’entrejambe en répétant: -Pas un geste ou je sors mon flingue. Sans aucune révolte, je fais exactement ce qu’il attend de moi. C’est tellement énorme, tellement prévisible. Je suis en même temps spectatrice et protagoniste d’un mauvais rêve. Le policier me dit de me retourner, me met des menottes, me pousse sur la banquette arrière de sa voiture, verrouille les portières, prend mon sac dans la Chevi, me jette mes affaires et démarre en trombe, gyrophare allumé.