mardi 3 mai 2011

Je suis réveillée par.. (97)

  Je suis réveillée par un grand chien noir qui me renifle, me lèche les doigts de pied, son maître l’appelle de la cabane voisine, l’hirsute me voit et s’approche, me dit bonjour, me souhaite la bienvenue dans l’oasis. Il s’appelle Alan, il vit là depuis six mois avec sa copine Linda et le chien. Il m’invite à venir prendre un thé. Je lui dis que j’arrive dans dix minutes, le temps de piquer une tête. La baignade est bonne tout comme l’accueil et le thé. Ce couple d’américains a vécu en Inde comme il se doit, et comme il se doit sont devenus bouddhistes, ils ont trouvé leur gourou à Goa, font régulièrement la navette entre ici et là-bas. Des gosses de riches apparemment. Ils sont sympas, je peux laisser mes affaires dans leur gourbi très joliment arrangé avec de la récup et bois flotté. Ils me donnent des tuyaux pour les choses d’ordre pratique, tel que le puits se trouvant au centre de l’oasis où on peut se laver; des wc secs, installés à quelques mètres plus loin sur la plage; un marchand passe le jeudi pour ravitailler ce petit monde, ils sont une quinzaine à vivre dans la palmeraie. Quelques autochtones viennent se mêler à la vie de ces nomades occidentaux, parmi eux un vieux bédouin qui a des bouts d’allumettes devant les yeux pour garder les paupières ouvertes, il vit sur la plage parmi les hippies dont il est devenu la mascotte. Je demande à mes voisins s’ils connaissent la région. Ils n’ont jamais quitté leur plage. J’ai envie de bouger. A part la route qui va jusqu’à Sharm-el-sheikh, il n’y a rien; sortir des sentiers battus est peut-être risqué à cause de mines éventuelles, je n’en sais rien, après tout on est en territoire occupé... Pour le moment, je me contente de nager, de flemmer, de regarder autour de moi. Tout le monde fume des pétards par ici et partagent sans hésiter. J’ai emmené de quoi dessiner. Chaque jour, je fais quelques croquis en tirant sur un bout de joint, que demander de plus! Je n’ai pris aucune lecture, c’eût été trop lourd et puis, ce n’est pas un endroit pour lire. Pour ce qui est du sexe, je n’ai trouvé personne, ils sont tous en couple, finalement assez conformistes sous leurs airs de baroudeurs! Je me rends compte que vivre avec Zer, d’avoir un second sexe à portée de main c'est un côté pratique de la vie à deux, dès que je me retrouve seule, le manque se fait pressant. Me revient en mémoire le Robinson qui baisait la terre dans «Vendredi ou les limbes du Pacifique» de Michel Tournier, livre que j’avais acheté lors de mon dernier voyage à Bruxelles. J’ai perdu toute notion de temps, je me sens parfaitement bien, je pense très peu à Zer, par moment je me dis que je n’ai plus envie de retourner auprès de lui, je resterais bien ici, ce n’est évidemment pas possible, il faudra bien que je revienne à l’autre réalité. J’ai enfin trouvé une certaine paix intérieure que je perdrai aussitôt de retour.