Je passe mes journées entre plage et cinéma. Je ne vois plus Lisa; elle prépare une thèse en sociologie. Une fois de plus, elle a trouvé une bonne poire pour se faire aider en la personne de son prof de fac de Bruxelles qui donne cours à Nice en ce moment.
Je tombe par hasard sur Lisa en allant à la plage, elle me parle longuement de son travail qui se termine grâce à la sollicitude de Ray, son prof. D’ailleurs, elle m’invite à fêter cela ce soir, on ira rejoindre Ray à Pampelune, près de St Tropez où elle a rendez-vous dans un de ces restaurants à la mode. Nous arrivons avec une demi-heure de retard, l’endroit est très beau, une table nous est réservée au jardin, la nuit est douce et Ray avec ses petits yeux pétillants, charmeur et drôle à souhait, mais doté d’un physique un rien ingrat. Je comprends pourquoi cet homme d’une quarantaine d’années s’est dévoué à ce point pour Lisa. Ray dévoile de façon involontaire qu’il n’a pas simplement donné quelques conseils pour la thèse de Lisa, il a pratiquement fait le boulot à sa place! Je parle d’Israël avec Ray qui lui aussi a vécu un temps là-bas. Ces parents sont morts dans les camps; à la fin de la guerre, à la sortie de l’orphelinat, il est envoyé en Israël contre son gré. Cette soirée est pour moi sans doute, un des derniers moments de répit avant longtemps... Je retourne encore à Marseille, c’est toujours le même topo, il faut que je revienne dans quinze jours; rien ne bouge. Je téléphone à Zer, lui non plus ne parvient pas à débloquer la situation. Cela fait trois mois que je suis en exil forcé, j'en ai marre, malgré mes nombreux va-et-vient chez Anne qui est vraiment adorable avec moi. Comme je l’avais pressenti dès notre première rencontre, Anne est très malade et endure de terribles douleurs. Devenue accro à la morphine, elle dépérit lentement.
Je me rends compte que je ne peux m’éterniser ici, je décide d’aller à Bruxelles.